Le phare est un édifice mythique qui hante l’inconscient collectif. Impressionnante bâtisse érigée vers le ciel, aussi droit qu’un phallus, la fascination qu’il exerce sur notre imaginaire ─ indépendamment de sa forme ─ s’explique par le fait qu’il est très exactement à l’intersection de trois mondes opposés et inconciliables : la terre, l’eau et l’air. Construit au beau milieu d’un no man’s land le plus souvent hostile : à l’extrémité d’une jetée, sur une presqu’île, à quelques kilomètres de la côte, il impressionne par sa massive construction dont la pierre semble défier le temps. Soumis aux déchaînements des vents et des vagues, synonymes  de pertes et de peines pour les marins, il est cet avant-poste installé là pour tenter d’éviter les dangers inhérents aux nuits et aux tempêtes. Mais, s’il est le symbole de la vie qui cherche à primer sur la mort, il peut devenir aussi, dans des âmes meurtries, son contraire : ce guide qui indique la direction à suivre pour s’engager sur cette voie contre laquelle il lutte justement. Ce chemin périlleux que décident d’emprunter ceux qui veulent quitter définitivement terre, mer et ciel…

Philippe Parrot

Phare dans la tempête

Photographie de Tony Le Bastard

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Les amants d’un jour – Édith Piaf

 *      *      *      *

Poème 58 : Le phare de Phédra

 .

La pièce, avec sa fenêtre

Non loin du vieux phare,

Traite, toujours, les êtres

Qui s’aiment, avec égard.

*      *      *      *

Fougueux jeunes amants,

Ils rient dans l’ascenseur,

S’enlacent passionnément

Pour mêler leur âme sœur.

.

Sur le palier, main dans la

Main, ils gagnent le couloir

Au fond duquel elle veille là

Pour chasser leurs déboires.

.

La clé dans la serrure tandis

Qu’elle cliquette… leur cœur

Tambourine, ô vive mélodie

Qu’ils entendent, en chœur.

*      *      *      *

Il a poussé la porte, pressé

De la serrer dans ses bras ;

Pressé, surtout, de caresser

Celle qu’il appelle Phédra…

.

Leurs regards éperdus, dans

La liesse des retrouvailles, ils

Se jetèrent sur le lit, pendant

Qu’il s’abreuvait de son babil.

 .

Bien cachés dans leur antre,

À l’abri de la meute citadine,

Ils bénissent leurs liens entre

Folies et foi. Gracile ondine,

.

Elle l’enserre dans ses filets,

Prêt à sombrer et à la suivre

Dans ces abysses sans délai,

Tant il est dur de survivre…

*      *      *      *

Laissons-les maintenant car

Ils dorment le visage reposé,

Après leur tempétueux écart

Où leur amour sut s’imposer.

*      *      *      *

Il la contemple, face à la glace

Plaquée contre la vasque, nue,

Étaler au crayon et avec grâce,

Sur ses yeux, un khôl soutenu,

 .

Adossé à la porte grand ouverte

De la salle d’eau. Voilà l’heure !

Sereine beauté, Phédra, offerte,

Attise son désir et tue ses peurs.

*      *      *      *

Et en ce matin

Ils sont partis,

Soûls de câlins

Tout enhardis.

.

Indifférents à demain,

Se noyer dans la mer,

Se tenant par la main.

Si las des terres !

 .

fichier pdfP 58 – Le phare de Phédra

Poème écrit par Philippe Parrot

Commencé le dimanche 12 octobre 2014

Et terminé le lundi 13 octobre 2014

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