Totalement kitsch avec ses couleurs criardes, ses taches scintillantes disposées ça et là sur une queue de sirène d’un bleu trop bleu et ses thèmes éculés de mer, de plage, de femme à demi-nue offerte au regard dans une pose languide, cette image m’a de prime abord fait sourire, trouvant décidément que « trop c’est trop » dans l’abus des clichés. Mais la première impression passée, une fois ce mauvais goût déploré, toujours aussi fleur bleue qu’une midinette, je me suis laissé prendre au piège et charmer par la longiligne silhouette de cette ondine. L’idée m’est alors venue de la mettre en scène et, passant de la couleur au noir et blanc, j’ai changé l’atmosphère pour que l’illustration soit plus conforme à mes humeurs du moment. Le tour était joué et les mots n’avaient plus qu’à prendre le relais…
Philippe Parrot
Photo trouvée sur internet – Auteur non identifié
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Poème 62 : Échouage
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Vieil escogriffe au regard ébahi,
Dans l’air crépusculaire
D’un soir sans mémoire,
Au bord des sémaphores
D’une mer agitée de chimères,
J’ai vu, quasiment nue,
Une sirène désemparée
S’échouer puis dénouer
Sa chevelure, sublime parure.
Sur une grève de rêves
Où s’arrêtent les crêtes
Et les brumes d’écume.
Ah ! Ces vagues, elles narguent !
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Lasse de voyager, elle m’émut.
En un éclair, sa galère
D’errances à outrance
A glacé mes pensées…
Je me suis soudain cru mais tu,
Chasseur de ces Sages,
Contrariés qu’elle nage
Complice des abysses…
Abandonner, brisée, la damnée,
À la vindicte sans raison
Reviendrait, quel attrait,
À réfuter, avec l’air buté,
Ses larmes, pleines de charme.
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Ô mes sens, attendrissez-vous
À ces pleurs d’un cœur !
Effleurer sans l’apeurer,
Délicat, avec mes mains
Et son accord, ce corps adoré !
À l’instar — et avec l’art —
D’un amant, oser une fois,
Oublieux des doux contes,
La chérir un instant, plein de foi.
Sache conjurer, bravache,
Le sort ! Vaincs ta honte !
Délaisse tes préjugés ! Ose
Et, tu verras, s’en ira ta froideur !
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Portée sans fin par la puissance
Des eaux vives océanes,
Tu vins t’offrir un mois
D’automne, en pâture :
À nous, matérialistes convaincus,
Bêtes de bien trop croire
À notre brillante Raison,
Au jugement pernicieux.
Fuir ta prison dorée pour les sables
D’hommes cruels et sots !
Prendre dès lors le risque
De passer sous leur joug !
Quelle cherté le coût de ta liberté !
.
Ton visage las parut me supplier.
Souhaitais-tu de l’aide ?
Diable, serait-ce louable
De te dire ou de mentir,
D’être authentique ou hypocrite ?
Si fatiguée de naviguer,
D’être menée, chahutée,
Par des courants errants,
Obligée contre eux de te débattre !
Te poser, et ne plus lutter,
Ailleurs où c’est meilleur !
Voilà pourquoi, sans force,
Une orque te porta jusqu’à la plage.
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Ô ma Belle, à trop m’écouter,
Tes maux, à mes mots,
Accrus, effarée soudain
D’apercevoir nul espoir,
Pas plus sur la terre qu’en mer,
Avec la marée là, prête,
Tu as alors levé la main,
Pour faire voir ton choix.
Nageant non loin de toi, inquiet
D’un parti pris sans prix,
Surgissant, d’un puissant
Coup de mâchoire, docile,
Le monstre t’ingéra dans sa gueule.
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Dans les airs, un vol radieux
De très insignes cygnes.
Ils arrivaient en renfort.
Intrigué, me touchaient
Leurs grandes ailes blanches,
Leur fin cou tout étiré et
Leur chant. Ils parlaient
De toi, fière hors-la-loi…
Corps en charpie, salvatrice mort,
De tes membres broyés,
Dévorés dans l’instant,
Ton aura s’est libérée…
Je l’ai vue s’élever dans les cieux.
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Touché, j’ai gardé en mémoire
Cette envolée à ta gloire,
Ta belle âme transportée
Dans le vent, ton garant !
Par leur irruption, ils sauvèrent,
En ce monde à la ronde,
Sacrés rieurs migrateurs
Qu’aucun orage n’enrage,
Ton être en quête de plénitude !
À tournoyer longtemps,
Ils l’incitèrent, épanoui,
À s’élancer vers les Nues,
Comblé d’être enfin pur esprit…
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Et moi, pitoyable, qui ai glacé tous tes émois, sur un galet
J’ai trouvé une écaille de toi sauvée de la bataille, tout coi.
Je l’ai gardée comme souvenir pour la regarder à l’avenir.
Désespéré de ne plus croire en ta venue, ma belle disparue !
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Poème écrit par Philippe Parrot
Commencé le samedi 15 novembre 2014
Et terminé le vendredi 21 novembre 2014
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