Que cherche cet homme confronté à une vertigineuse solitude ? Sans doute à fuir ses semblables et ses démons, désireux de trouver, loin de la civilisation, les réponses aux questions qu’il se pose… Au terme d’une marche périlleuse qui lui montra combien il faut être déterminé pour atteindre un but, le voilà parvenu au milieu des cimes, seul face à la pureté originelle du Monde ! Oublieux des souffrances qu’il endura, devant cette mer de nuages qui lui laisse entrevoir l’Infini, peut-être espère-t-il ressentir l’impérieuse nécessité de la méditation qui permet de discerner, dans la contemplation de la beauté de la nature, le sens caché des choses ?
Car, bouleversé par cette magnificence qui dépasse l’entendement et met en évidence sa propre petitesse, l’homme se convainc soudain de n’avoir plus d’autre choix — pour occulter le sentiment de sa propre impuissance ! — que d’espérer son salut dans la réflexion. Si l’on peut fort bien concevoir qu’une telle démarche convienne effectivement au sage, à l’inverse, pour l’individu qui rejette l’hégémonie de la toute puissante pensée, trouver le chemin de la rédemption passera par une autre voie : l’abandon du cœur aux puissances de l’irrationnel, impatient de se perdre dans les tortueux méandres de la déraison qui conduisent tout aussi sûrement, d’illuminations en jouissances, vers soi !
Philippe Parrot
Le voyageur contemplant une mer de nuages (1818) – Tableau de Caspar David Friedrich
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Avertissement : Compte tenu du caractère obscène de certaines strophes, la lecture de ce texte est déconseillée aux personnes sensibles.
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Poème 153 : Vertiges de la solitude
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Je suis une lave fumante,
Extraite d’un haut volcan,
Accoucheur sans violence
De nymphes syphilitiques,
Tombées dans des boxons
Où des satyres attendent,
Hampe entre les cuisses,
Des taureaux pédérastes
Qu’ils souhaitent enfiler,
Racailles incandescentes
De mèche avec l’Éther !..
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Branché sur des orages,
Traqueurs de montagnes,
Violeuses de firmaments,
Dépucelés sans vergogne
Par leurs crêtes vicieuses,
J’ai senti aux vifs éclairs,
Prêts à me botter le cul,
Enflammé jusqu’à l’os,
L’imminence de la fin
Du Monde à l’agonie,
Indifférent au Bien…
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J’ai dégueulé mes tripes
Et rongé tous mes ongles ;
J’ai rouvert mes blessures,
Ces cendres dans leur urne
De mes passés en poussière
Dans leur cercueil de verre,
Extrayant dans un souffle,
Sûr aucunement dernier,
Les restes d’une hétaïre
Brûlée dans une église
Par un moine tueur.
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De son splendide corps,
De maîtresse ès luxures,
Ne restait dans un coin,
Près du chœur, suintant
De graisse dégoulinante,
Qu’un sein décomposé,
Gagné par la gangrène,
Où s’invitaient des vers,
Blanchâtres et affamés,
Pour un orgiaque festin
De mandibules voraces.
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Veule cour des miracles
Où l’ombre des ténèbres
Baisait maint feu solaire,
Où ses mânes immortels,
Dans des rais de lumière,
Faisaient poindre au loin
L’aura de cent suppliciés,
J’ai vu son fantôme astral
Se vautrer sur l’autel brisé,
Nu, près du grand crucifix,
Maudissant ses bourreaux.
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Des vieillards cacochymes,
Dragueurs de filles nubiles
Dans leur songe trop lourd,
Emportés par la déferlante
D’abjectes concupiscences
Qu’ils cachent lâchement,
Le soir d’impies bûchers !
Avec ma gueule enfarinée
Et ma langue pendante,
Je l’ai bouffé tout cru,
Ce morceau calciné.
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Ivre de ces ripailles,
Au bord de la folie,
Les yeux exorbités,
Avec un air dément,
J’étais ce saint déchu,
Sauveur du crépuscule
De sa ferveur humaine.
Un gnome en excursion,
Hideux et démoniaque,
A déféqué dans un coin
Une tonne de pendules.
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Lorsque sonna minuit,
Une louve s’est installée
Sur mes genoux cagneux
D’amoureux cannibale…
Habitée par des diables,
Elle voulait que je mute
En un preste loup-garou
Pour courir tous les deux,
Dans nos rêves délictueux,
Vers des contrées bibliques
Où les agneaux se donnent.
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Mes mains en sang,
Du sien évidemment !
Sa peau entre mes dents,
Un peu de son mamelon,
Dans ses pores, toujours,
Ses fragrances de putain,
Rappelaient à mes sens
L’aube incréée, morte
Avant même d’être,
De par la volonté
De fous évadés.
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Sans exiger mon reste
Aux ogres galactiques,
Survenus tous en force
Par les vitraux explosés,
J’ai pris en me marrant,
Mes jambes à mon cou,
La poudre d’escampette,
Les sevrant d’une bouffe,
Ces goûteurs de bipède.
Songeant aux femmes,
J’ai fui par une fente.
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Avec le goût en moi
De ses chairs fatales
Seules à me taillader,
Drôle de lame effilée,
Dans l’œil du cyclone
De mon cœur dévasté,
J’ai rejoint ces sphères,
Sublimes et spirituelles,
Où les queues s’étiolent
Et les sens s’émoussent.
L’aire des pures vérités !
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P 153 – Vertiges de la solitude
Poème écrit par Philippe Parrot,
Commencé le lundi 1 février 2016
Et terminé le mercredi 3 février 2016.
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