À l’heure où chacun d’entre nous s’affiche sur les réseaux sociaux, prêt à se livrer corps et âme, il résulte d’un tel exhibitionnisme qu’à réduire le dialogue à de la communication et l’intimité à du voyeurisme, l’ère numérique a substitué à la perception sensible de l’autre une représentation virtuelle, toute fantasmagorique.
Seul bastion à résister à la déshumanisation de nos liens sociaux, le café ! Lieu convivial par excellence, il est cet espace urbain où des personnes de chair et d’os, a priori étrangères les unes aux autres, s’y croisent pourtant, ravies de trouver là l’occasion de se voir et de se parler, dans une ambiance chaleureuse.
Brassant les classes sociales, libérant la parole, autorisant contacts et rapprochements, il est ce lieu où, du fait de sa « promiscuité » organisée et bienvenue, une évidente chaleur humaine demeure aujourd’hui encore, permettant à chacun de fuir sa solitude, d’oublier ses soucis, voire de se lancer à la conquête de l’autre pour le convaincre ou le séduire.
Théâtre sans parterre, il est cette scène où chacun est, sans faux-semblant et le temps d’une rencontre, l’acteur de sa vie, reconnu et accepté comme tel par les autres membres de cette fraternelle communauté.
Philippe Parrot
Café noir et blanc, Joinville-le-Pont – Photo de Robert Doisneau (1912 – 1994)
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Poème 189 : Le zinc
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Au comptoir, en demi-cercle, du troquet,
Chaque jour je lève joyeusement le coude.
En jupe courte tu te pavanes. L’air coquet,
Chemisier échancré, à la star d’Hollywood
Tu joues. Et moi, pilier de bar, je trinque…
Étudiants ouvriers employés ou chômeurs
Le disent bien : Va boire une bière au zinc,
La patronne sympa y est de belle humeur !
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Dans cette ambiance bon enfant, mes craintes
Disparaissent à noyer dans l’alcool mes peines
Du moment mes regrets du passé mes étreintes
D’antan. Dans l’euphorie, les gars m’entraînent,
Ô combien rigolards ! Chacun y va de ses propos
Fumeux, ces sottes paroles où sombrent à jamais
Dans des abysses d’ivresses, dites à fleur de peau
Des vérités simplistes à mettre entre guillemets…
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J’aime sans restriction ces stériles polémiques,
Ces discussions oiseuses, ces débats drôlatiques
Où l’on assène ignare, le verbe haut, la mimique
Facile, des banalités, sous des tons emphatiques.
Car, c’est dans la vacuité des pensées échangées,
Au milieu des verres des bouteilles, des accolades
Et des rires que j’oublie que l’autre m’est étranger
Tant il y a de fraternité dans toutes nos régalades.
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Tant il y a aussi, chaque midi, dans ses yeux bleus
D’attente du grand amour, dans le fond de la salle
Où elle s’assoit, seule, près d’un dessert moelleux.
Dans son tailleur strict, si elle paraît peu cordiale,
Derrière sa réserve, je la crois disposée, peut-être,
À m’écouter… Alors, je me prends souriant à rêver
D’oser dès demain l’inviter, posé et de moi maître,
À prendre un café et plus, prêt pour elle à changer.
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Poème écrit par Philippe Parrot
Commencé le samedi 25 juin 2016
Et terminé le dimanche 26 juin 2016
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