Un vieux chêne mort, un écureuil amoureux de la lune nichant dans une de ses branches… Une abeille déboussolée par la mort de sa reine, en quête de miel et d’autre chose, mais de quoi… Une diablesse venue d’ailleurs, mais d’où, pour accoucher d’un monstre qui régnerait sur la ruche… Une horde de soudards, barbares conquérants, tueurs assoiffés de sang, débarqués soudainement pour faire table rase du Passé… Un soleil, effaré par ce monde à la dérive, en plein chaos, qui baisse les bras et disparaît à l’horizon… Enfin, une fée appelée à la rescousse pour sauver cette Terre maudite jusqu’à ce que, bien trop vénérée…
Bref, un univers cauchemardesque, sans queue ni tête, sans direction ni sens, qui se désagrège sous nos yeux et sombre dans le Néant, choses et êtres broyés, dans une vision apocalyptique de fin du monde.
Philippe Parrot
Ce poème peut être mis en parallèle avec une de mes nouvelles : Forestius, entre ciel et terre.
Photo trouvée sur Pixabay.com – Auteur « 12019 »
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Poème 321 : L’écureuil et la fin du monde
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Dans l’imbrication des branches
D’un grand chêne vénérable, mort
Et sans aucune feuille, sauf Une,
Encore accrochée par miracle,
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Desséchée et flétrie, se penche
Dans le vide, jouant au matamore,
Un écureuil tant amoureux de la Lune
Qu’il porte sa pâle face au pinacle.
* * * *
En bas, sur le sol, à l’herbe drue
Parsemée de maintes fleurs colorées,
Offertes, fragiles et odorantes, une abeille
À l’âme déchirée, au cœur meurtri, butine…
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En quête de pollen, à tire-d’aile, elle se rue.
Désireuse d’oublier que, dans leur abri, à l’orée
D’un sous-bois, leur Reine n’est plus depuis la veille.
À devoir constamment enfanter, qui l’a tuée ? La routine !
* * * *
Destin scellé, à jamais dans le Temps, d’Elle
Il ne restera plus rien, sinon les songes creux
Des larves indifférentes à son sort implacable,
Se nourrissant déjà de son corps pourrissant…
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Même si, dans l’essaim, se désespèrent ses fidèles,
Prêts à chercher ailleurs, soucieux d’être heureux,
Dans les brumes d’une aube naissante et louable,
Une anfractuosité où s’installer, vifs et bruissants.
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À moins que la main d’une diablesse, toute nue,
Ne soulève le lourd couvercle de la ruche endeuillée
Et n’accouche, au chaud dans la loge royale, d’une autre,
Mi-humaine, mi-insecte. Conçue par quel démoniaque dieu ?
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Dans l’iris de ses yeux, aussi bleu que les Nues,
On y lirait ses craintes en demain. Pareils à ces œillets
Accrochés à la boutonnière de la veste souillée d’un des nôtres,
Pornographe notoire, ils trahiraient nos destins d’êtres vils et odieux…
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Mais voilà qu’un éclair déchire l’horizon sale
D’où surgit tout à coup une flopée d’hommes
Conquérants et armés, aux visages cramoisis,
Torturés par la haine et leurs envies de mort…
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Au bruit des sabots des chevaux, noirs et mâles,
Chevaliers errants, fiers d’exterminer en somme,
Ils arrivent au pas de charge, drogués à l’ecstasy.
Chacun sait qu’ils tueront sans honte et remords.
* * * *
Face à leur ignorance crasse, bardée de certitudes,
Face à leur barbarie, tétanisé, le soleil s’est couché,
Posant son dernier vif rayon sur les grains de sable
D’un désert surgi du Néant pour assoiffer leur bête.
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Serait-ce ses dernières chaleurs, sous nos latitudes,
Portées par le sirocco vers nos esprits effarouchés ?
Au centre du débile désastre, à coup sûr regrettable,
Un pitbull, oreilles et queue coupées, était à la fête…
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L’écureuil comprit la fin du monde très proche.
Dans l’hémorragie du jour privé de tout son sang,
Ses artères déficientes exsangues de vives lumières,
Dans un élan de compassion à l’égard des Humains,
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Du faîte de l’arbre centenaire, il libéra à leur approche,
Une fée tombée des étoiles, aux pouvoirs puissants.
Elle stoppa les hordes cannibales et statufia, fière,
Le molosse, tendant aux rares survivants sa main.
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Si fine et délicate, si diaphane et douce qu’ils l’adulèrent
Tant, qu’émerveillés par cette magique chair, ils la dévorèrent !
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Et l’écureuil s’en est allé, en deuil, effaré par tant de bêtises étalées !
P 321 – L’écureuil et la fin du monde
Poème écrit par Philippe Parrot
Entre le 6 et le 8 mars 2018
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