Comme elle le faisait depuis quelques années, Émi attendait avec impatience l’arrivée de la colombe sur le rebord de la fenêtre. En effet, dès les premiers jours du printemps, l’oiseau débarquait d’on ne sait où pour fêter avec elle la nouvelle saison, ne cessant de roucouler bruyamment et de faire d’incessantes révérences derrière la vitre.
Émi s’en amusait habituellement mais, cette fois, dès qu’il se fut posé, l’envie lui prit de voir si le volatile se laisserait prendre entre ses mains. Elle ouvrit les battants et, contre toute attente, voilà qu’il se laissa saisir facilement, bombant même le torse, nullement effarouché lorsqu’elle s’enhardit à déposer un baiser sur son poitrail…
Philippe Parrot
Photo libre de droit trouvée sur Pixabay.com (auteur : Capri23auto)
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Poème 326 : Émi et la colombe
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Aux premières heures
De ce printemps attendu,
Quand fleurissent les combes,
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Sous les cieux à l’honneur,
Au bleu d’un pur rendu,
Revient la colombe…
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Arrivée dès la neige partie,
Elle roucoule contre la vitre
Pour qu’Émi ouvre la fenêtre
.
Et, le froid poussé vers la sortie,
Lui tende sa fine main, en arbitre
Quelques graines à vite lui remettre.
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Rebelle, assise sur le rebord,
Imperméable aux prêches,
Elle croit en la promesse
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D’aubes brillantes comme des ors.
Son ventre fécond sur la brèche,
Ses pensées inaptes à confesse,
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Elle ne croit plus au Merveilleux.
À se savoir admirer, de par ses grâces
Naissantes, la voilà, les sens tout en émoi,
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Le cœur battant, qui, à l’enfance, veut dire : adieu !
Et, pendant que son fidèle compagnon ailé picore, vorace,
Se fait entendre dans sa poitrine l’invite à suivre une charnelle voie.
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Dans l’ivresse printanière du beau temps,
Tandis que monte, par vagues, la sève,
Elle frémit de plaisir à sentir son âme
.
Se féliciter en secret du ciel éclatant,
Du soleil éblouissant, là haut sans trêve,
De ses rayons brûlants, pareils à des flammes.
* * * *
Qu’elle chérit ce mâle messager, édifiant
Héraut annonciateur de la venue
De l’époque des Amours !
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Les garçons vont parader dans l’air vivifiant,
Les femmes vont se vêtir de légères tenues
Et maints désirs vont surgir en retour.
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À voir chassées langueur et grisaille d’hiver,
À voir conquérante sa beauté, séduisante
Et fantasque, Émi se rit sans remords
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Des peurs des gens trop âgés. Envers
Et contre tous, elle s’offrira à d’électrisantes
Expériences, nourricières de l’esprit et du corps.
* * * *
En ce début d’avril, en cette journée radieuse,
Où l’instant la porte avant de disparaître,
Aussi fugace qu’une onde sur l’eau,
.
Ravie de se sentir irrésistible et délicieuse,
Elle pose ses lèvres sans vouloir paraître
Sur le poitrail bombé du fier oiseau…
* * * *
À l’imaginer bel archange,
Aux grandes ailes déployées,
Incarné en volatile par bonheur,
.
Elle éprouve alors l’étrange
Égarement des vestales dévoyées,
Taraudées par d’inextinguibles ardeurs.
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Elle devine que l’attendrissant baiser
Trahit — pour qui saurait comprendre —
Son inavouable désir de satisfaire ses faims.
.
Adolescente pugnace qui refusa toujours de biaiser,
Voilà qu’en ce matin, à vouloir vivre ce qu’implique s’éprendre,
Émi décide et se réjouit d’abandonner ses rêves. Pressée d’aimer enfin !
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Poème écrit par Philippe Parrot
Entre le 10 et le 12 avril 2018.
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