C’est aux premières lueurs de l’aube qu’Erwan avait entendu des petits coups secs contre la vitre. Il avait ouvert les yeux et aperçu un albatros sur le rebord de la fenêtre. Voilà le signe qu’il attendait…
À faire partie de cette génération perdue, en perpétuelle quête d’emplois, poussée à la périphérie des grandes métropoles, abandonnée à elle-même dans un monde marchand où seules comptaient la satisfaction immédiate de désirs factices, l’insatiable jouissance de biens inutiles, la consternante mise en scène d’actes insignifiants, enfin, l’irrépressible addiction à maints univers virtuels, il avait éprouvé lui aussi ce désarroi à se sentir exclu d’une société où s’imposaient uniquement paillettes, spectacles et faux-semblants. Avec d’autres, il avait donc œuvré — parfois avec violence — pour que les choses changent…
Mais, avec les années, il avait vu ses compagnons de route grandir et, devenus adultes, jouir à leur tour de ces prérogatives qu’ils avaient si longtemps contestées et reproduire les mêmes abus qu’ils avaient jadis condamnés. Ainsi, avait-il compris que les hommes sont disposés à se battre pour leurs idéaux aussi longtemps qu’ils sont dépossédés du Pouvoir. Pour peu qu’ils s’en emparent, les voilà aussitôt qui renient leurs propres convictions, prêts à défendre pied à pied leurs illégitimes privilèges !
Cette trahison, Erwan ne pouvait l’accepter. Sûr qu’il ne parviendrait plus à les changer, trop las pour continuer ce qui n’était plus qu’un vain combat, à comprendre que l’oiseau des mers l’invitait au voyage, ce matin-là, il décida de tout plaquer : famille et pays pour aller découvrir le monde et plus encore sa vérité.
Nul ne le revit jamais.
Philippe Parrot
Photo libre de droit trouvée sur Pixabay.com ( Auteur : Jodeng )
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Poème 340 : Jeune et rebelle !
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Quand la rage t’étreint,
Au creux de tes reins,
Et qu’elle va bon train,
Crie-la donc au vent marin !
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Un fier et solitaire albatros entendra
Ta colère envers cette génération de quadras :
Banquiers, traders ou affairistes, tous fiers-à-bras,
Qui exhibent leurs richesses avec tant d’apparat !
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Sur ton épaule large, alors,
Il se posera, piailleur et accort.
Étonne-t’en de prime abord,
Puis apprends de son sort !
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Pense à son courage
D’insoumis, au passage
Des tempêtes, bel ancrage
Qui le rend altier et sauvage !
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Prends-le comme exemple !
Au lieu de t’emporter, contemple
La noblesse de son vol, haut et ample,
Loin des tours de Wall Street, leur Temple !
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La Sociale-Démocratie qu’ils prêchent,
C’est afin que tu n’allumes aucune mèche,
C’est en vue de colmater la plus petite brèche
Dans ton esprit et que tu files droit, n’empêche !
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Leur bienveillance affichée, quelle frime !
Leurs libéralités, quelle dérisoire dîme !
Veuille gravir de purificatrices cimes !
Émerveillé, cherche ce qui t’anime !
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Vois la détermination de l’oiseau !
Lutte sans jamais plier tel un roseau !
Brise les liens de leurs mercantiles réseaux !
Bats-toi pour déposséder de leur pouvoir ces zozos !
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Regarde-le te quitter, ailes déployées,
Parti vers les Nues ! Cesse de t’apitoyer !
N’escompte guère, par de longs plaidoyers,
Transformer le cœur de ces privilégiés dévoyés !
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Pareil au noble voyageur, sans un mot,
Accepte d’endurer d’innombrables maux
Pour renverser cette oligarchie au plus tôt,
En donnant un sacré coup de plumeau !
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Écoute tous les sans-grades, auprès de toi !
Leurs paroles conditionneront tes choix !
Rejoins tous les exclus, privés d’un toit !
Ensemble, imposez de plus justes lois !
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Ensuite, à l’argent, aux biens, aux paillettes, fais tes adieux !
Ta liberté arrachée à ces cyniques et cupides messieurs,
Va ton chemin sans bagage mais avec l’air radieux,
Prêt à rire, chanter, danser, aimer en tout lieu !
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Poème écrit par Philippe Parrot
Entre le 18 et le 20 juillet 2018.
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