Lorsque l’on ressent le besoin de se ressourcer, épuisé par la charge mentale que représente la gestion des soucis quotidiens, professionnels ou non, partir, seul, au bord de la mer, s’avère souvent un moyen efficace pour chasser lassitude et doutes.
À marcher sur une plage déserte, pieds nus sur le sable, les orteils léchés par les vagues qui viennent jusqu’à soi pour mourir, le visage caressé par le vent, les cheveux mouillés par les embruns, les narines envahies par de grisantes odeurs d’iode, l’on se sent soudainement requinqué, l’esprit apaisé, le cœur serein, en accord avec soi-même et le monde, comme si la mer, au fil de notre errance sur la grève, nous avait glissé aux oreilles de judicieux conseils, voire de profondes vérités.
Quelques heures plus tard, grandi par ce silencieux et magique échange, galvanisé par cette vivifiante promenade et ce drôle de compagnonnage, l’âme et le corps en paix, l’on peut songer à retourner chez soi « affronter » les autres, ravi d’avoir su écouter la mer et tirer de ses enseignements une nouvelle manière de vivre, plus en accord avec soi….
Philippe Parrot
Photo libre de droit trouvée sur Pixabay.com ( Auteur : Imordaf )
* * * *
Poème 403 : Apprends à écouter la mer…
.
L’enfant songeur
Fixe l’océan, im-
Mense, sombre.
Il y a, dans ses
Reflets, comme
L’éclat des pre-
Miers crépuscu-
Les sur la Terre
Que nul homme
Ne contempla.
Antédiluviens
Ravissements.
.
À ses pieds, une
Étoile de mer…
Elle transfigure
Sa conscience
Car, à la voir,
Sur la grève,
Il imagine les
Astres, perdus
Dans l’espace.
Pas très loin,
Une méduse
Échouée…
.
Elle ravive
Un souvenir.
À ne pas oser
La toucher,
Tant elle est
Urticante, il
Se rappelle
La varicelle
Qu’il eut à la
Maison avant
Que ne meurt
Sa mère…
* * * *
C’était, sous
Les moiteurs
Accablantes
D’un bel été,
Pimpante dans
Sa robe légè-
Re, tellement
Transparente
Qu’il devinait
Ses jambes,
Élégantes
Et graciles.
.
Elle désirait tra-
Verser l’avenue,
Ravie de venir le
Rejoindre quand
L’auto l’a fauchée.
Dans les vibrations
De l’air, l’Invisible
S’est ouvert, béan-
Ces tueuses d’espé-
Rances, portail gla-
Çant franchi dans
Les cris et le sang.
.
Il a voulu hurler
Mais les mots
S’enfouissaient
Dans la glaise
— Fangeuse —
Des marais de
La sidération,
Vite reléguant
L’Innommable
De la scène dans
D’épaisses et sou-
Daines ténèbres.
* * * *
À présent que
Ses cendres
— Dispersées
Au bout de la
Jetée, au pied
Du phare où
Ils venaient —
Se sont mêlées
Aux vents et à
La mer, il aime
La retrouver, là.
Et lui parler…
.
Bouleversante
Réminiscence !
En pensée, il la
Revoit, malgré
Ses yeux em-
Bués de larmes,
— Éclatante
Comme
Un soleil ! —
Déposer, sur
Ses joues pâ-
Les, un baiser.
.
Touchante évo-
Cation qui ex-
Hume tant de
Forts moments
De l’existence,
— À jamais an-
Crés dans sa
Chair — parta-
Gés avec elle et
Qu’un jour, le
Diable, en per-
Sonne, lui ravit.
* * * *
Elle était… une
Jeune femme qui
Rayonne, animée
Par un feu inté-
Rieur. Lequel dé-
Vorait ses crain-
Tes et ses peurs
De gosse timoré.
Incandescent lien
Maternel, brûlant
Comme la foi, tou-
Jours, il l’irradiait.
.
Tandis que des
Mouettes criar-
Des survolent le
Rivage, c’est la
Résurgence de
Ces poignants
Bonheurs qu’il
Revit… Intime
Film projeté à
L’envers, son
Esprit remon-
Te le Temps…
* * * *
Au-dessus de la
Table où ils dî-
Nent — Qu’eux
Deux ! — il y a
Un éclairage dis-
Pensateur d’une
Douce lueur dans
La nuit naissante.
Son aura laiteuse
Et enveloppante,
Invite aux rêves,
Les tranquillise.
.
Dans son regard
Attendri, il sait
Décrypter, sans
Arrêt, à jamais,
Qu’elle l’aime…
Tant il perçoit, au
Bleu de ses yeux,
— Bien au-delà
De ses peines et
Devoirs — qu’elle
S’épanouit à l’a-
Voir tout à elle.
.
Cependant, à la
Houle qui grossit
Et brise le fil ténu
De cette échappée,
Il sent bien, mal-
Gré le tendre filet
Jeté — assailli par
Un vif vague à l’â-
Me — qu’il ne re-
Tiendra rien dans
Ses mailles, sinon
Des mots et images.
.
Quel sens alors
Donner à ses pas
Sur la plage où
L’usure des ga-
Lets, sous l’as-
Saut des marées,
Atteste du Temps
Qui passe et ne re-
Vient, hélas, pas ?
Aucun ! Le Destin,
Hautain et impavide,
Sépare sans raison.
* * * *
Orphelin
Désormais
— Au milieu
Des gens en
Guerre contre
Eux-mêmes
Et les autres —
Il ne distingue
Aucun sentier,
Plongé dans le
Noir, sans elle
Pour le guider.
.
Pointé vers le ciel,
Lointain et vaste,
Avec son rai puis-
Sant, au jaune cru
Incandescent, le
Phare quant à lui,
Arrimé à la roche,
S’efforce de percer
L’horizon afin d’é-
Clairer la voie des
Marins partis navi-
Guer au long cours.
.
Altière bâtisse,
Il provoque les
Étoiles éparpil-
Lées — brillan-
Ce contre bril-
Lances, rayon
Contre éclats,
Sans apporter
Au garçon, en
Manque d’hu-
Maine présen-
Ce, de soutien.
* * * *
Subitement,
Abasourdi,
Lorsqu’une
Déferlante
S’écrase au
Bas de la tour,
Fracas assour-
Dissant, il sait,
Tout recouvert
De gouttes, que
La mer l’apostro-
Phe brutalement.
.
« Écoute, gamin !
Au fil des jours,
Entre mes flots et
Elle en poussières ;
Entre la violence
De mes rouleaux à
L’avant de la jetée
Et l’infinie douceur
De son âme noyée,
Baignant entre
Deux eaux, une
Complicité est née.
.
En austère gardien
De son Monde d’Ou-
Tre-Tombe, sache
Qu’avec constance
Et respect, je veille
Au repos, au milieu
Des dauphins, de
Celle qui sut, du-
Rant trop peu d’an-
Nées, par ses actes
Et ses paroles, si
Fortement t’aimer.
.
Cependant, au
Vu de ta peine,
Les restes de sa
Personne qu’hier
Tu dispersas, je
M’emploie à ce
Que tu ne puisses
Les voir, fondus
Dans le décor ma-
Rin. À devoir l’ac-
Cepter, apprends
À lâcher prise !
.
Votre amour de ja-
Dis, si merveilleux
Qu’il fut, ne doit res-
Ter qu’au travers une
Lumière conduisant
Ton être déboussolé,
À l’image du phare
Où chacun vient trou-
Ver, dans sa solidité
Et son rayonnement,
La force inexpliquée
De persister à vivre.
.
Ce terre-plein hos-
Tile, tant battu par
Les vents, ne libére-
Ra jamais ton cœur
Du poids de ton Pas-
Sé. Pourtant, ces ins-
Tants finiront, bien-
Tôt, par s’estomper…
Prépare-toi, dès lors,
À pressentir un jour
L’heure venue d’ar-
Rêter ce pèlerinage !
.
Parce que tu te plais
À supputer que mes
Eaux tumultueuses
Charrient les restes
De ta mère, parmi
Les blanchâtres em-
Bruns qui éclabous-
Sent ton visage, tu
Veux croire… qu’un
Peu d’elle — écume
Devenue — effleure
Ta peau tremblante.
.
Aussi impression-
Nante que soit la
Tempête… Aussi
Terrible que soit l’é-
Crasement des rou-
Leaux… Aussi bruy-
Ant que soit le ruis-
Sellement des flots
Autour du promon-
Toire, rien n’ébranle
Ta naïve croyance,
Péché de jeunesse…
.
Dans l’émergence
De tes souvenirs
Bien qu’ils soient
Si fragiles, tu pui-
Ses assez d’énergie
Et de courage pour
Chercher à combler
Ce funeste abîme, si-
Tué hors du Temps,
Où se dissolvent les
Êtres et les choses.
Inexorablement…
.
Bien que la nature
Se déchaîne, n’ou-
Blie jamais ce lieu
Attirant où elle re-
Pose… Le rai tour-
Nant de la lanterne
Chasse toute peur…
Flambeau, il te faut
L’emporter, partout,
En toi, pour éclairer
Ta route, sitôt quit-
Ter ces rudes terres.
.
Il te guidera, sur ta
Voie singulière long-
Temps… À le savoir
Illuminer l’endroit
Où elle est disper-
Sée, ton vif chagrin
S’estompera. Géan-
Te Lampe d’Aladin,
Il libérera toujours,
Dans ton imaginai-
Re, d’une magique
Manière, son être.
.
D’autant plus beau
Sortilège qu’au mi-
Lieu de ce paysage
Désert et fantasmé,
C’est sa voix suave
Et enchanteresse
Que tu entendras,
Rassurée de han-
Ter les ondes, tant
Que tu vivras… Un
Dieu compatissant
Vous choierait-il ?
.
Remercie-le — quel
Qu’il soit, en haut
De son Olympe —
De son étrange sa-
Gesse qui mêle an-
Ges et démons, bien
Et mal, vie et mort !
Ces contraires dy-
Namisent vos exis-
Tences terrestres et
Concourent à don-
Ner but à vos actes.
.
Aie donc la sagaci-
Té de comprendre
Cet enjeu dialecti-
Que. Il impulse vos
Âmes et les force à
Grandir, voire à se
Transcender. Plon-
Ge tes mains dans
Les vagues ! C’est là
Que flotte, invisible,
Ta mère, transmuée
En un jeu d’atomes.
.
Voilà ce que nous
Sommes ! Des élé-
Ments de l’univers
Qui renaissent tou-
Jours de la matière
Morte… ailleurs, un
Jour, recomposés en
De nouvelles structu-
Res… Crois-moi, elle
Est bien là mais sous
Une autre forme que
Celle que tu connus !
.
Ne t’en plains pas
Aux Cieux qui res-
Tent indifférents.
C’est conforme à la
Nécessité que le fir-
Mament soit aveugle
Et sourd à tes pleurs
Comme à tes doléan-
Ces… Malgré le froid
Piquant de cette soi-
Rée d’automne, fais
Preuve d’humilité !
.
Ne doute pas qu’elle
Vive autrement, par-
Delà ses prévenances
Qui hantent ta mé-
Moire. Elle est Éter-
Nité, de par ses cen-
Dres cachées dans les
Courants. Elle est l’I-
Naltérable qui dan-
Se à ma surface, em-
Portée par la houle
Jusqu’auprès de toi.
.
À faire tien cet axio-
Me : rien ne meurt,
Tout renaît, tu ces-
Seras enfin d’être
Désemparé. À sen-
Tir qu’elle demeure,
Troque ton désarroi
D’enfant contre cette
Paix de l’homme qui
Voit l’Immortel dans
Les choses fugitives
Et les êtres fugaces.
.
C’est dans l’accep-
Tation de la péren-
Nité de ce-qui-est-
Au-monde, par-de-
Là ses apparences,
Trompeuses et pas-
Sagères, que ton es-
Prit trouvera enfin
Un sens légitime aux
Mirages d’Ici-Bas. À
Y rallier ton cœur, il
Orientera ta marche.
.
Avant de regagner
La ville, une derniè-
Re fois, écoute avec
Attention, à travers
Mes propos, sa voix
Avenante et posée.
Elle t’amène à dis-
Cerner combien il
Est vain de vouloir
Revenir en ces lieux
Isolés… Exauce son
Cher vœu et mûris !
.
Alors, au-dessus de
Cet abysse qui pré-
Tend vous séparer,
À entendre ses éva-
Nescentes paroles
T’inciter avec con-
Stance à t’autono-
Miser, tu devine-
Ras brusquement
L’âpre et long che-
Min qui te changera
En adulte. Sans elle.
.
Oui ! À la deviner là,
Intemporelle ondine
Préoccupée par ton
Sort, soulagé qu’elle
Revête un nouvel as-
Pect, tu décideras de
Ne plus revenir, fort
D’avoir saisi qu’e-
Xister, c’est passer
D’un avatar à… un
Autre, pris dans un
Malstrom de cycles »
.
P 403 – Apprends à écouter la mer…
Poème écrit par Philippe Parrot
Entre le 1 et le 11 octobre 2019
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